Le psychiatre en service à l’hôpital Laquintinie indique également que nombre de ces malades généralement stigmatisés ont également des tendances suicidaires.
Vous avez, au cours de la journée mondiale contre l’épilepsie, fait une présentation sur le thème « pathologie psychiatrique et épilepsie ». Quel est le lien entre l’épilepsie et les pathologies psychiatriques ?
6 personnes épileptiques sur 10 vont développer une souffrance ou une maladie mentale. Et donc, il faut les accompagner parce que c’est 60% d’épileptiques qui ont des chances de développer des troubles psychiatriques, et qu’on aura accompagné. Toutes les maladies chroniques, toutes les maladies qui prennent le temps de guérir, toutes ces maladies qui désocialisent le malade nécessitent d’avoir un accompagnement psychologique. Au-delàs de la maladie, il faut pouvoir désamorcer la souffrance et l’atténuer.
Cette souffrance peut parfois conduire au suicide. Comment faire pour désamorcer cette envie que peut avoir le malade de mettre un terme à sa vie ?
Pendant la consultation, il faut pouvoir demander discrètement au patient s’il a des pensées suicidaires. Le fait de le lui demander n’augmente pas le risque de se suicider, mais, créer un soulagement inimaginable pour le patient épileptique. Evidemment qu’il faut le faire discrètement en lui demandant par exemple s’il a des projets pour les jours qui viennent, s’il se demande si la vie ne sert à rien, s’ils regrettent de vivre. Et là, ils se lâchent pour la plupart. Certains vont parfois jusqu’à dire que s’ils n’y avait pas leurs enfants, ils se seraient suicidés ; ou que si leur mari n’avait pas fait ceci ou cela pour elles, elles auraient déjà mis fin à leur jour. Et il est démontré que tous ceux qui passent à l’acte suicidaire ont très souvent informé quelqu’un ou laissé une lettre.
Quel est le rôle de l’accompagnateur dans la prise en charge du malade épileptique ?
Globalement, dans l’espace du soin, il y a trois experts, le soignant parce qu’il a été à l’école pour apprendre à soigner, le deuxième expert et le plus important est le patient parce qu’il est le seul a ressentir sa douleur. C’est lui qui sait combien il souffre, comment se manifeste son mal. Le troisième expert est l’accompagnant. C’est celui qui vit les crises à la maison, il se réveille la nuit pour donner les médicaments, celui qui dépense de l’argent.
Donc, on ne s’occupe pas seulement du malade, parce que la souffrance s’étale aux accompagnants. Il faut les écouter parce qu’ils savent pleines de choses que nous ne savons pas. Ils peuvent même arriver à nous aider à modifier certains conseils que nous donnons à d’autres gens qui sont à l’entrée du soin. Certains aidants de soins courent après leurs patients depuis une dizaine d’années, d’hôpitaux en hôpitaux. Et donc, si on les écoute, ils peuvent aider dans le traitement et même dans la prescription médicale.
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